mercredi 31 octobre 2007

Vivre en France par Corinne Maier

La France est déprimée. Une étude du CAS, Centre d'analyses stratégiques, dresse un portrait du Français qui se résume ainsi : il a peur de perdre son emploi, peur de la pauvreté, peur de l'avenir, peur que ses enfants vivent moins bien que lui. Il n'a pas confiance en ses institutions, sa justice ou sa police. Il n'a, à vrai dire, confiance en personne, et seulement 22% de Français estiment qu'on peut faire confiance aux autres la plupart du temps (moyenne de l'Union européenne : 30%).

Un chiffre qui ne m'étonne pas : louer ou acheter un appartement en France est un parcours du combattant, de même qu'obtenir un boulot (même sans intérêt et mal payé). Dans les deux cas, c'est tout juste s'il ne faut pas supplier, même quand on est prêt à payer pour se loger, et à travailler pour mériter son salaire. Et il faut dire merci ensuite. Une fois qu'on est logé et employé, il vaut mieux ne pas bouger, car changer de logement ou d'emploi, c'est tellement compliqué… Des choses simples, comme inscrire un enfant à l'école ou obtenir un rendez-vous à l'hôpital, peuvent aussi se transformer en épreuve pour les nerfs. La vérité, c'est que vivre en France est un sacerdoce. Il n'est pas facile de se mouvoir dans une société opaque, stratifiée, donneuse de leçons, dans laquelle l'individu ne fait rien sans réseau. Alors les étudiants vont étudier ailleurs, les jeunes se précipitent à Londres (« Londres est en passe de devenir la septième ville de France, avec quelque 300 000 de nos concitoyens résidant dans la capitale britannique ») pour travailler, et le Canada comme la Belgique accueillent un nombre croissant de désabusés du système français. 160 000 rien qu'en Belgique…

Pourtant le Figaro et le Monde, qui rendent compte l'un et l'autre de cette étude illustrant le pessimisme français, tombent d'accord sur ceci : il ne serait pas justifié. Les Français ne sont pas contents, mais en France, on est bien, nous explique-t-on. La preuve que ça ne va pas si mal, les Français ont plein d'enfants, ça c'est merveilleux, non ? Tout ça grâce à qui ? A l'Etat, et à sa formidable politique familiale, exceptionnelle en Europe. Et puis, les Français sont plus égaux que d'autres. Après transfert des prestations sociales, le taux de pauvreté est plus faible que dans la moyenne de l'UE. Enfin, la protection sociale dont les Français jouissent constitue « un modèle que le monde entier nous envie », pour reprendre l'expression consacrée.

Françaises Français, vous n'êtes que des ingrats. Vous devriez être heureux, si heureux de vivre en France ! Avec tout ce que la France vous donne, qu'est-ce que vous attendez pour lui dire merci ?

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Le même jour dans Le Monde:

La compétitivité de la France continuerait de régresser. Le pays rétrograde de la 15e à la 18e place du classement Global Competitivness Index publié mercredi 31 octobre par le World Economic Forum (WEF), organisateur du célèbre Forum de Davos (Suisse). Ce résultat contredit celui publié en septembre par la Banque mondiale, et qui concluait à une amélioration du climat des affaires en France depuis trois ans.

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RI-GI-DI-TE:

Or, le marché du travail français est jugé désastreux. Les relations entre employeurs et salariés sont mal notées. Les grèves actuelles n'y sont pour rien, puisque les enquêtes ont été réalisées au printemps. La rigidité du marché du travail est aussi mise en cause. Quelques données macro-économiques, comme l'ampleur du déficit budgétaire et le niveau d'endettement, pénalisent aussi la France.

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-En dix ans, les troubles musculo-squelettiques sont passés de 1000 à 35 000 par an.
-En 2005, il y a eu 760 000 accidents du travail en France. Deux personnes par jour meurent dans des accidents du travail.
-Deux millions de salariés subissent du harcèlement mental et des maltraitances, 500 000 sont victimes de harcèlement sexuel.
-Le coût annuel des accidents du travail, des maladies professionnelles et de la maltraitance s'élève à 70 milliards d'euros pour l'Etat et les entreprises.
-Sur cinq ans, on a constaté plus de 1000 tentatives de suicide sur les lieux de travail en France, dont 47% ont été suivies de décès.
-10% des dépenses de la sécurité sociale sont directement liées aux maladies professionnelles.
-Eczéma, insomnies, alertes cardiaques, troubles musculo-squelettiques, ulcères, cancers, dépressions, tentatives de suicide sont les conséquences les plus fréquentes des maltraitances sur les lieux de travail.
-Durant la dernière année jurdictionnelle, les tribunaux aux prud'hommes ont traité 250 000 litiges.

la suite sur Rue89:
http://www.rue89.com/2007/10/31/jai-tres-mal-au-travail-des-mots-sur-les-maux-du-boulot#comment-126765

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