mardi 20 avril 2010

Flash mobs raciales à Philadelphie

Courrier Intl'

Avant, il s’agissait de rencontres spontanées farfelues mais inoffensives organisées via Internet dans des lieux publics. Aujourd’hui, les flash mobs ont le goût amer de la violence, écrit le New York Times.

A Philadelphie, les flash mobs, ces mobilisations éclair de groupes dans des lieux publics, ont pris un tour agressif. Des centaines d’adolescents se retrouvent dans le centre-ville pour un rituel qui tient du harcèlement et de la course de taureaux : ils descendent la rue en courant et s’arrêtent parfois pour se bagarrer, agresser les passants ou se livrer à des actes de vandalisme.

La police a fini par en avoir assez et a annoncé qu’elle allait faire respecter le couvre-feu en vigueur et le renforcer si d’autres incidents se produisaient. Les autorités envisagent de rendre les parents légalement responsables des actes de leurs enfants et de faire cesser la validité des cartes de transport gratuit pour les jeunes à 16 heures au lieu de 19 heures pour les dissuader de venir dans le centre.

Les flash mobs ne sont pas une spécialité de Philadelphie, mais il s’y en produit plus souvent qu’ailleurs. Les autorités se font désormais aider par le FBI pour surveiller les réseaux sociaux sur Internet. Les chaînes de télévision et les stations de radio recrutent des artistes de la scène hip-hop pour diffuser des messages exhortant les adolescents à mettre fin à ces pratiques. L’année dernière, au moins quatre flash mobs ont dégénéré à Philadelphie. Dans l’une d’elles, des jeunes vagabonds ont déclenché des bagarres, plusieurs spectateurs ont été blessés et au moins trois personnes ont été arrêtées. “On aurait dit un tsunami de gamins”, raconte Seth Kaufman, 20 ans, livreur de pizzas à Olympia II Pizza & Restaurant, dans South Street. Il relève sa chemise et montre des estafilades sur son dos et son bras. Il a également des hématomes sur le front, dus aux coups de pied et de poing qu’il a reçus en essayant d’empêcher une foule déchaînée d’entrer dans le restaurant, où se déroulait déjà une bagarre générale.

Les habitants de la ville commencent également à se plaindre du nombre d’enfants laissés sans surveillance. Les défenseurs des enfants, eux, demandent s’il y a assez d’activités pour les occuper après l’école. “Nous avons besoin de plus d’emplois et de jobs d’été pour les jeunes, de plus d’activités extrascolaires, et de plus de soutien de la part des parents”, déclare Shelly Yanoff, de Public Citizens for Children and Youth, une association de défense des enfants de Philadelphie. Mme Yanoff explique que le budget alloué aux bibliothèques et aux activités extrascolaires a été réduit et qu’un programme destiné aux jeunes délinquants a été brusquement supprimé. Récemment, deux adolescents ont agressé une femme dans le cadre d’un jeu violent baptisé Catch and Wreck [Attraper et démolir] dont le but est de choisir une personne paraissant sans domicile, la passer à tabac et lui prendre son argent. La police, qui affirme que ces actes n’ont aucun lien avec les flash mobs, a arrêté les coupables, un garçon de 11 ans et une fille de 12 ans.

La plupart des adolescents qui y ont participé sont noirs et issus de quartiers pauvres. Les zones où ils sévissent sont majoritairement des quartiers d’affaires blancs. Des passants ont entendu des groupes de jeunes scander les mots “Black boys” [jeunes Noirs] et “burn the city” [mettez le feu à la ville].

Le maire de Philadelphie, Michael Nutter, qui est africain-américain, rejette l’idée que l’appartenance ethnique ou la réduction des services assurés par la ville soient des facteurs déclencheurs. “On ne doit pas chercher à justifier des comportements inadmissibles, déclare-t-il. Il n’y a pas de composante raciale (...) LOOOOL

Bill Wasik, rédacteur en chef de Harper’s Magazine, revendique l’organisation de la première flash mob en 2003. Selon lui, les flash mobs ont commencé comme une sorte d’expérience sociale amusante ayant pour but d’encourager la spontanéité et l’appropriation des zones commerciales et des lieux publics par un groupe de personnes, simplement pour montrer qu’ils pouvaient le faire. “Il est horrible que les flash mobs de Philadelphie tournent à la violence”, déplore-t-il.

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