Installée en France, la journaliste Mitsuko Zahar publie dans son pays un essai insolite et décapant sur les habitants de la capitale. Florilège.
«Les Parisiens ont des goûts de chiotte!»
C'est en ces termes châtiés que l'on pourrait traduire Parisiens wa aji onchi, le titre du pamphlet qui fait le buzz de Tokyo à Nagasaki, depuis sa sortie en juin dernier (1). La raison de ce succès? «Jamais aucun auteur japonais n'avait encore osé briser notre amour pour la France», explique le chroniqueur Kei Nakamura dans Yomiuri Shimbun, premier quotidien du pays (diffusé à 14 millions d'exemplaires). On ne saurait mieux dire...
En 35 petits chapitres bien rythmés, Mitsuko Zahar, ancienne danseuse de music-hall devenue journaliste free-lance, installée à Paris depuis 1970, croque les tics et les TOC des habitants de la capitale. «J'ai usé de votre plus belle qualité -la liberté de ton- pour raconter vos pires défauts», résume-t-elle. Sont évidemment disséqués quelques-uns des travers que les French bashers (bouffeurs de Français) anglo-saxons ressassent à longueur de best-sellers: les odeurs suspectes dans le métro, les chauffeurs de taxi atrabilaires ou la nonchalance des garçons de café. Mais le prisme nippon révèle aussi des tares hexagonales insoupçonnées.
Les poux, par exemple: au Japon, ces insectes répugnants ne sont qu'un mauvais souvenir remontant au Moyen Age; en France, ils sont une sorte de bizutage qui fait sourire les maîtres d'école, n'affole pas les parents d'élèves et enrichit les pharmaciens. «Le jour où j'en ai trouvé dans les cheveux de mes enfants, j'ai manqué m'évanouir.»
Le haschich: les Français aiment ça et, lorsque Karl Zéro raconte chez Ardisson que Laurent Baffie en a fumé à la table de Nicolas Sarkozy à l'Elysée, tout le monde rigole. Impensable au Japon, où l'un des plus illustres sumos s'est fait suspendre à vie pour une tête d'épingle de résine.
Les minuteries dans les toilettes font rire Tokyo
Les parapluies: à Tokyo, où la pluviométrie est certes plus importante, on en a toujours deux ou trois sous la main et il s'en vend à tous les coins de rue ; à Paris, on les perd systématiquement et on préfère attendre sous un Abribus que l'averse passe. Fatalisme exotique pour le Tokyoïte, toujours pressé! «Mes amis nippons ont longtemps fantasmé sur Cherbourg, où ils s'imaginaient trouver des parapluies aussi chics que ceux du film de Jacques Demy. Je les envoyais boulevard Saint-Germain, dans l'une des seules boutiques spécialisées, où la clientèle était à 90 % japonaise!»
Autre exemple cocasse: les minuteries. Des cages d'escalier aux parkings, il y en a partout en France. «C'est un détail infime qui traduit votre indiscipline. Au Japon, ça n'existe pas. On a appris à éteindre. Votre ingénieux système de lumière déclenchée par la fermeture du verrou des toilettes fait beaucoup rire mes lecteurs.»
A propos des Parisiens qui donnent des leçons de cuisine alors qu'ils ne savent plus faire une mayonnaise, divorcent comme ils changent de chemise ou méprisent les Belges, l'auteure n'y va pas non plus de main morte. Mais l'on ne critique bien que ceux que l'on aime: «J'adore vos pompiers défilant le 14 Juillet, terriblement sexy, mais aussi votre profonde affection pour les chiens et les chats et votre façon charmante de rendre service. Il m'est arrivé plusieurs fois de tomber en panne, il y a toujours eu un automobiliste pour m'aider. A Tokyo, je serais encore sur le bord de la route!» Meilleure preuve de sa passion pour sa ville d'adoption, Mitsuko Zahar avoue, à la fin de son livre, qu'elle s'est offert il y a une vingtaine d'années sa place au cimetière Montparnasse et, par la même occasion... la nationalité française!
(1) Aucune traduction n'est pour l'instant prévue en France, hélas...
http://www.lexpress.fr/styles/question-style/defauts-de-parisiens-vus-par-une-japonaise_778252.html
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