jeudi 12 août 2010

C’est au tour des ouvriers d’Europe occidentale de sauter le pas vers les pays d’Europe centrale

Adieu plombier polonais, Guten Tag menuisier allemand

Le mythe du plombier polonais qui ôte le pain de la bouche des travailleurs Allemands est désormais dépassé. Selon l'édition roumaine de Foreign Policy, c’est au tour des ouvriers d’Europe occidentale de sauter le pas vers les pays d’Europe centrale, où les emplois ne manquent pas.

Avec une croissance économique d’1,7% en 2009, la Pologne est restée le pays le moins touché par la crise en Europe de l'Est. Même la tragique disparition de la plupart des élites responsables de ce succès n'a pas dévié la trajectoire ascendante polonaise. En conséquence, des milliers d'Est-Allemands franchissent aujourd’hui l’Oder à la recherche d'un emploi.

Officiellement, plus de 2 500 Allemands travaillent dans des centres d'appels, dans le bâtiment et d'autres secteurs aux alentours de la ville de Szczecin, mais les chiffres officieux qui circulent sont beaucoup plus élevés. Un travailleur allemand qualifié peut gagner environ 1 000 euros par mois en Pologne - pas beaucoup, mais mieux que rien. A un jet de pierre, dans le district allemand Uecker Randow, le taux de chômage s'élève à 20%.

Ce phénomène nouveau constitue une preuve supplémentaire d'un mouvement de transhumance inverse. Si dans les années 1950-1960 les Turcs ou les Grecs migraient vers l'Allemagne, la crise économique incite désormais les Allemands à émigrer, en Pologne, ou... en Turquie.

Les Germano-Turcs rentrent "chez eux"
De jeunes Germano-Turcs quittent également la terre où ils sont nés pour retourner dans le pays d'origine de leurs parents. Selon une étude de l'Institut Futureorg de Dortmund, 38% des jeunes Turcs diplômés veulent retourner en Turquie. La moitié d’entre eux affirment "ne pas se sentir chez eux" en Allemagne, où ils estiment être traités en étrangers. Ils étaient environ 5 000 à émigrer en 2008.

Outre ce sentiment de non-intégration, l'autre raison qui les pousse à partir est la discrimination sur le marché du travail. Selon une étude réalisée par l'Université de Constance, ceux qui portent des noms turcs auraient 14% de chances en moins d'être convoqués à un entretien d'embauche. Par contre la Turquie, qui connaît depuis plusieurs années un boom économique continu, offre des opportunités d'emploi alléchantes et se montre intéressée à l’idée d’absorber une main-d'œuvre hautement qualifiée et polyglotte de surcroît.

Les diplômés en gestion des affaires ou ingénierie, bilingues et imprégnés d'une éthique du travail à l'allemande, représentent le profil favori des employeurs turcs. "L'Allemagne perd ainsi non seulement de la main d'œuvre hautement qualifiée dont elle a financé l'éducation, mais aussi des individus qui pourraient contribuer de manière décisive à l'intégration réussie(?) de la minorité ethnique", regrette Astrid Ziebarth dans une analyse pour le German Marshall Fund.

Les reflux grec et irlandais
De façon prévisible, les Etats le plus durement touchés par la crise enregistrent eux aussi un exode des jeunes qualifiés. Nombre de jeunes grecs qui étaient rentrés au pays après avoir fini leurs études à l'étranger, ont perdu leur emploi et envisagent de repartir.

Pendant la période de forte croissance économique, le "Tigre celtique" se félicitait du fait que les nouvelles industries gardaient les autochtones au pays et attiraient les Irlandais de la diaspora disposés à travailler dans la construction et les services financiers. Aujourd’hui, les victimes des compressions salariales font la queue pour émigrer.

Portugais de l'ancienne colonie africaine
Avec un chômage d'environ 10% dans leur pays, des dizaines de milliers de portugais cherchent désormais fortune en ... Angola, ancienne colonie lusitaine d’Afrique australe. Grâce aux revenus élevés du pétrole, l'économie angolaise affiche une croissance de 16% par an sur les cinq dernières années, contre 1,1% pour l’économie portugaise.

Le boom angolais assure plus d'opportunités professionnelles, en raison de la pénurie importante de main-d'œuvre qualifiée dans l'ingénierie, les télécommunications, le commerce de détail et le secteur bancaire.

Près de 25 000 portugais y ont immigré au cours des trois dernières années. Parmi eux des patrons de petites entreprises, des cadres ou des ouvriers qualifiés (maçons, électriciens, chefs de chantier, etc.). Bien que marqués par les traumatismes de la période coloniale et de la lutte pour l'indépendance, les forts liens linguistiques, historiques et culturels qui unissent les deux pays facilitent l’intégration des Portugais.

Vu de Roumanie
Vive la fuite des cerveaux !
"Lorsque le chef de l’Etat en personne fait l’apologie de l’émigration, cela marque la faillite du pays", note Jurnalul National, au sujet des récentes déclarations du président Traian Băsescu. Celui-ci avait loué le "courage" des Roumains qui ont quitté le pays et qui ont le bon goût de contribuer à sa richesse par leurs remises tout en ne pesant pas sur sa protection sociale. Qu'importe que la Roumanie "risque de rester sans médecins, que les patients soient abandonnés sans remords par l'Etat et que les cerveaux quittent le pays !" ironise le journal. La fuite de cerveaux ne concerne pas que la Roumanie : au moment où le chômage repart à la hausse un peu partout en Europe, Lidové noviny explique que dans certains pays, comme l’Allemagne et le Royaume-Uni, les chasseurs de têtes s’adressent de plus en plus à l’étranger afin de trouver des profils correspondant à des postes stratégiques tels qu’ingénieur, informaticien, cuisinier ou médecin.

http://www.presseurop.eu/fr/content/article/313701-adieu-plombier-polonais-guten-tag-menuisier-allemand

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